31 décembre 2007

 

Un exposé des faits par le PDC qui réfute
Murdered by Mumia

Le grand mensonge au service
d’un lynchage légal

Mumia est innocent ! Libréz-le immédiatement !

Nous reproduisons ci-dessous un communiqué publié le 31 décembre 2007 par le Partisan Defense Committee (PDC).

* * *

Murdered by Mumia (Assassiné par Mumia, The Lyons Press, décembre 2007), de Maureen Faulkner et Michael Smerconish, est une compilation de mythes, de contrevérités, de déformations des faits et d’omissions qui tous ont pour objectif le lynchage légal d’un innocent, Mumia Abu-Jamal. Mumia est un ancien porte-parole du Black Panther Party, cible désignée du FBI et des flics depuis l’âge de 15 ans, devenu plus tard un partisan de l’organisation MOVE et un journaliste reconnu, surnommé « la voix des sans-voix ». Il a été la victime d’une machination : accusé d’avoir tué, le 9 décembre 1981, l’agent de police Daniel Faulkner, il a été condamné à mort explicitement pour ses opinions politiques. Une abondance de preuves démontre son innocence, y compris les aveux d’un autre homme, Arnold Beverly, qui a reconnu que c’était lui, et non Mumia, qui avait tiré sur l’agent Faulkner et l’avait tué.

Murdered by Mumia est publié à un moment où la popularité de la peine capitale s’effrite, comme on l’a vu dernièrement avec l’abandon de la peine de mort par l’Etat du New Jersey, et où la libération de détenus condamnés à tort pour meurtre fait grand bruit dans la presse. Ce livre est un plaidoyer pour l’institution barbare de la peine de mort qui aux Etats-Unis est un héritage de l’esclavage des Noirs. Dans ce livre, Maureen Faulkner, la veuve de Daniel Faulkner et l’une des principales porte-parole de la campagne du Fraternal Order of Police [FOP – une association de policiers] pour faire exécuter Mumia, s’est associée avec le journaliste de radio et éditorialiste de droite Michael Smerconish.

Faulkner et Smerconish ne font pas mystère de la nature politique de la machination contre Mumia : ils reprennent à leur compte le mensonge selon lequel son appartenance au Black Panther Party prouverait qu’il avait l’intention de tuer un flic. Ils claironnent que l’accusation aurait « réussi à établir qu’Abu-Jamal avait une philosophie anti-police, anti-establishment, anti-gouvernement qui expliquait son désir d’assassiner Danny » (page 44). C’est parce que Mumia a toujours, éloquemment et fièrement, lutté pour les Noirs et les opprimés que les forces de « l’ordre », représentées à la fois par les Partis démocrate et républicain, veulent sa mort. Pour le pouvoir raciste, il représente le spectre de la révolte noire.

Murdered by Mumia prétend à plusieurs reprises que les minutes du procès de Mumia en 1982, ainsi que les déclarations faites avant le procès par les témoins, « racontent comment Abu-Jamal a assassiné mon mari » (page 29). Les minutes du procès fourmillent d’incohérences, d’affirmations sans preuve, d’éléments contradictoires, et de toutes les marques distinctives d’une machination raciste. Il n’existe aucune preuve que Mumia ait tiré sur Daniel Faulkner, et les « faits » dont Murdered by Mumia prétend qu’ils démontrent soi-disant cette thèse n’existent pas dans les minutes du procès. Depuis le procès de 1982, une montagne de nouvelles preuves se sont accumulées qui démontrent non seulement que Mumia est innocent, mais aussi que la police et l’accusation ont truqué et éliminé des preuves, fait pression sur les témoins et orchestré une machination monumentale.

L’exposé des faits que voici met en lumière l’énormité des mensonges sur lesquels repose chacune des affirmations contenues dans Murdered by Mumia. Notre objectif est d’armer ceux qui se battent pour Mumia avec les faits qui leur permettront de réfuter les mensonges éhontés de ceux qui veulent l’exécuter. Ceci fait partie intégrante de nos efforts pour mobiliser des actions de protestation de masse en faveur de Mumia, centrées sur la puissance sociale du mouvement ouvrier et basées sur la certitude que Mumia Abu-Jamal est innocent, qu’il est la victime d’une machination raciste et politique et qu’il doit être immédiatement libéré !

En réfutant les mensonges de Murdered by Mumia, nous citons, date et numéro de page à l’appui, les déclarations des témoins faites avant et pendant le procès de 1982, et pendant les audiences post-condamnation (PCRA) de 1995-1997 (tous ces documents sont désignés par les initiales « NT » [notes de témoignage]), ainsi que les déclarations et dépositions sous serment faites auprès de tribunaux fédéraux et d’Etat, et les rapports d’enquêtes de police (RII [Rapports d’interrogatoire d’enquête]). Les citations tirées de Murdered by Mumia sont suivies du numéro de page. Nous invitons aussi les lecteurs à se référer à la brochure publiée en juillet 2006 par le PDC [et en français en novembre 2006 par le Comité de défense sociale], la Lutte pour libérer Mumia Abu-Jamal – Mumia est innocent ! Cette brochure contient des présentations détaillées des faits ainsi qu’une série de déclarations et de dépositions sous serment. Elle est disponible sur le site http://www.partisandefense.org/pubs/innocent.

Ce qui s’est passé le 9 décembre 1981

Le mensonge : Dans pratiquement chaque chapitre de leur livre, Faulkner et Smerconish prétendent que ni Mumia ni son frère William Cook, qui étaient sur les lieux où Faulkner a été abattu, n’ont présenté leur version de ce qui s’était passé le 9 décembre 1981. Ils écrivent par exemple : « Jamais, en vingt-cinq ans, et malgré une campagne mondiale en sa faveur, il [Mumia] n’a présenté d’explication sur ce qui s’était passé le 9 décembre 1981 » (page 47).

La vérité : Dès le début, Mumia a toujours clairement affirmé qu’il était innocent. Le 3 mai 2001, il a fait une déclaration sous serment, comme l’avait fait son frère le 15 mai 1999 et le 29 avril 2001, expliquant en détail ce qu’ils avaient vu la nuit où Faulkner a été abattu. Le 8 juin 1999, Arnold Beverly, dans une déclaration sous serment, a expliqué en détail comment c’était lui, et non Mumia, qui avait tué Faulkner. Smerconish et Faulkner le savent – ces déclarations, et la déclaration sous serment de Beverly, sont en ligne sur le site internet Daniel Faulkner lui-même ! (voir http://www.danielfaulkner.com/original/testimony.html)

Dans sa déclaration, Mumia affirmait : « Je n’ai pas tiré sur l’agent de police Daniel Faulkner. Je n’ai rien à voir avec la mort de l’agent de police Faulkner. Je suis innocent. » Il décrivait ensuite comment il était sorti en courant de son taxi, garé dans le Centre-Ville, après avoir entendu des coups de feu et avoir vu d’autres personnes qui couraient, et après avoir reconnu son frère qui titubait dans la rue. « J’ai vu un flic en uniforme se tourner vers moi, le pistolet au poing, j’ai vu un éclair et je suis tombé à genoux. » Mumia a été gravement blessé à la poitrine. Il poursuivait : « La première chose dont je me souviens ensuite, c’est d’avoir été réveillé par les coups qu’on me donnait. » Il se souvenait que les flics « hurlaient et juraient, m’empoignaient et me secouaient […]. On m’a mis debout, on m’a ensuite projeté contre un poteau téléphonique, on m’a frappé à l’endroit où j’étais tombé et on m’a jeté dans un fourgon. » Il déclarait ensuite que plus tard la porte du fourgon s’était ouverte et qu’un flic blanc en chemise blanche « est entré, m’a insulté et m’a frappé sur le front. Je ne me rappelle pas grand-chose de ce qu’il disait, sauf beaucoup de “sale n---e”, “fils de p--e de Noir” et autres insultes du même genre » (voir http://www.partisandefense.org/pubs/innocent/maj.html).

Dans sa déclaration de 1999, William Cook affirmait : « Mumia Abu-Jamal n’a pas tiré sur l’agent de police Faulkner, et je n’ai pas tiré sur l’agent de police Faulkner. » Cook expliquait qu’il avait « été stoppé par l’agent Faulkner alors que je circulais au Centre-Ville dans ma Volkswagen avec Kenneth Freeman ». Il affirmait également que Freeman, son passager et partenaire en affaires, « m’a raconté, après cette nuit-là, l’existence d’un plan pour tuer l’agent de police Faulkner, que Freeman participait à ce plan, qu’il était armé cette nuit-là et qu’il a participé à la fusillade ». Cook affirmait aussi que Freeman « s’est enfui après qu’on avait tiré sur l’agent Faulkner ». Dans sa déclaration sous serment de 2001, Cook affirmait que Freeman « portait sa veste de treillis verte » (voir http://​www.partisandefense.org/​pubs/​innocent/​wc.html).

Dans sa déclaration sous serment, Arnold Beverly affirmait que « Mumia Abu-Jamal n’a pas tiré sur l’agent de police Faulkner […] Jamal n’avait rien à voir avec la fusillade. » Beverly expliquait : « Un autre gars et moi, nous avons été embauchés et payés pour tirer sur Faulkner et le tuer. J’avais appris que Faulkner constituait un problème pour le milieu et les policiers ripous parce qu’il gênait les pots-de-vin et les paiements illicites effectués pour protéger des activités illicites au Centre-Ville, y compris la prostitution, le jeu et la drogue ». Beverly déclarait qu’on lui avait « donné un calibre 38 spécial du type utilisé par la police, et je portais également mon revolver personnel qui était de calibre 22 ». Beverly, qui comme Freeman portait une veste de treillis verte, déclarait qu’alors qu’il se dirigeait vers l’intersection de la 13e rue et de Locust Street, il avait « remarqué la présence d’agents de police dans les parages », mais que cela ne lui avait « pas causé d’inquiétude parce que j’estimais que, puisque j’avais un contrat avec le milieu pour descendre Faulkner, les agents de police ne pouvaient se trouver là que pour m’aider ».

Beverly racontait qu’il avait vu Faulkner sortir de sa voiture de patrouille et s’approcher d’une Volkswagen. Il avait entendu un coup de feu, puis un autre, qui lui avait éraflé l’épaule gauche. Il continuait en disant : « J’ai traversé Locust Street en courant et je me suis penché sur Faulkner qui était tombé à la renverse sur le trottoir. J’ai tiré sur Faulkner en plein visage et à bout portant. Peu après, un agent de police en uniforme a tiré sur Jamal en arrivant sur les lieux. » Beverly terminait en expliquant qu’il avait quitté les lieux « par les couloirs souterrains en prenant le “Speedline” [métro] et, par arrangement préalable, j’ai rencontré un agent de police qui m’a aidé à sortir du “Speedline” trois pâtés de maisons plus loin. Une voiture m’attendait et j’ai quitté le Centre-Ville » (voir http://www.partisandefense.org/pubs/innocent/ab.html).

Les déclarations sous serment de Mumia, de William Cook et d’Arnold Beverly, ainsi qu’une masse de preuves concordantes que nous détaillerons plus loin, ont été présentées devant des tribunaux fédéraux et des tribunaux d’Etat en 2001 (n° 99 Civ5089 et 8201-1357-59). Mais les tribunaux ont refusé ne serait-ce que de les examiner. De leur côté, Faulkner et Smerconish écartent les aveux de Beverly d’un revers de main, en les qualifiant de « pure stupidité » (page 28). Comme on pouvait s’y attendre, ils ne disent pas un mot sur la corruption omniprésente dans la police de Philadelphie, y compris sa coopération avec la pègre. A l’époque du meurtre de Faulkner, la police de Philadelphie faisait l’objet d’au moins trois enquêtes fédérales pour corruption, y compris visant les liens entre la police et la pègre (voir http://www.partisandefense.org/pubs/innocent/rw.html).

Les flics veulent tuer Mumia non seulement parce qu’il s’exprime avec éloquence pour la liberté des Noirs, mais aussi pour enterrer les preuves de leurs propres crimes.

Les témoins

Le mensonge : Selon Faulkner et Smerconish, « trois personnes ont vu Abu-Jamal le faire – quatre si on compte [Albert] Magilton, qui pendant un bref instant regardait ailleurs » (page 42). Les trois autres sont Cynthia White, Robert Chobert et Michael Mark Scanlan. Les « témoignages pendant le procès et les déclarations faites avant le procès par les témoins du meurtre […] apportent une confirmation claire et cohérente de la conduite d’Abu-Jamal » et « font preuve d’un haut degré de précision, en apportant des détails comme la marque de la voiture d’Abu-Jamal, la couleur de sa chemise ou son style de coiffure » (page 29).

La vérité : Aucun témoin n’a déclaré avoir vu Mumia, une arme à la main, en train de tirer sur l’agent Faulkner. Les déclarations des témoins sont confuses, incohérentes, et quand on entre dans le détail elles décrivent quelqu’un d’autre que Mumia comme étant le tireur. Pas un seul des témoins de l’accusation n’a jamais décrit la « marque de voiture » de Mumia – autrement dit, son taxi.

Mumia portait des dreadlocks, mesurait plus d’un mètre quatre-vingt et pesait environ 80 kilos. Il portait une veste de ski bleue avec une grande bande verticale rouge de part et d’autre sur le devant. Mark Scanlan, un Blanc de 26 ans, a d’abord décrit l’homme qu’il disait avoir vu tirer sur Faulkner comme portant un pull rouge et jaune, ou rouge, jaune et noir, et un bonnet noir. Scanlan a explicitement déclaré que l’homme n’avait pas de dreadlocks à la MOVE, mais une coupe afro. Il a en outre déclaré qu’il n’avait pas pu voir son visage (IIR 9/12/81). Il a témoigné lors du procès qu’il avait bu, et qu’il avait dit à la police : « Je ne sais pas quel homme a tué l’agent de police » (NT 25/6/82, page 13, 46 ; IIR 11/12/81).

Robert Chobert, un chauffeur de taxi blanc de 23 ans, a d’abord décrit une personne qu’il avait vue surplombant Faulkner et tirant sur lui comme quelqu’un de costaud et portant une chemise brun clair et un jean (IIR 9/12/81). Trois jours plus tard, il décrivait le tireur comme pesant environ cent kilos et portant une chemise gris foncé, avec un dessin rouge et vert dans le dos (IIR 12/12/81). Les deux fois, il reconnaissait ne pas avoir vu d’arme, et, dans sa seconde déclaration, ne pas avoir vu d’éclair de coup de feu (IIR 12/12/81).

Albert Magilton, un Blanc de 26 ans, a témoigné que tout ce qu’il avait vu, c’était Mumia marchant rapidement dans la rue (NT 25/6/82, p. 100, 106), et qu’il n’avait rien sur la tête (NT 25/6/82, p. 92). Il a aussi déclaré qu’il n’avait vu personne avec une arme (IIR 9/12/81 ; NT 25/6/82, p. 100). Le témoin de l’accusation Cynthia White, une prostituée noire de 23 ans, décrivait le tireur comme « petit » (IIR 9/12/81).

Une vingtaine de témoins, qui ont assisté à des phases différentes de la scène depuis des endroits différents et qui se sont vus les uns les autres, ont fait des récits divers de ce qui s’est passé.

Outre Beverly et Cook, six témoins, dont deux flics et deux témoins civils de l’accusation, ont rapporté que l’une des personnes présentes sur les lieux portait un treillis ou un parka militaire vert. Il s’agit des témoins Mark Scanlan, Albert Magilton, les agents de police James Forbes et Stephen Trombetta, Robert Pigford et William Singletary (Scanlan : NT 25/6/82, p. 26 et IIR 11/12/81 ; Magilton : interrogatoire de G.M. Newman 19/7/95 ; Forbes : IIR 9/12/81, 16/12/81 ; Trombetta : IIR 9/12/81 ; Pigford : IIR 9/12/81 ; Singletary : NT 11/8/95, p. 235-236). William Singletary a témoigné lors des audiences post-condamnation de 1995 qu’un passager de la Volkswagen, portant un treillis, était sorti de la voiture, avait tiré sur l’agent Faulkner et s’était enfui en courant (NT 11/8/95, p. 235-236). Le témoin Robert Pigford, qui devait par la suite devenir flic, déclarait à la police la nuit de la fusillade qu’immédiatement après avoir entendu des coups de feu, il avait vu un homme portant une veste de treillis penché sur Faulkner (IIR 9/12/81). Ni Mumia ni William Cook ne portaient de veste de treillis verte. Dans sa déclaration sous serment de 1999 où il avoue le meurtre de Faulkner, Beverly affirme : « Je portais une veste de treillis verte. » Dans sa déclaration du 29 avril 2001, William Cook affirme qu’il avait un passager dans sa voiture, Kenneth Freeman, et que Freeman aussi « portait sa veste de treillis verte ».

Le mensonge : Faulkner et Smerconish écrivent que Cynthia White « a été un témoin crucial dans notre affaire », parce qu’« elle était le seul témoin qui, à cause de l’endroit où elle se trouvait, a vu toute l’histoire, du début à la fin » (page 280).

La vérité : Cynthia White n’était même pas présente pendant la fusillade. Les témoins de l’accusation Chobert, Scanlan et Magilton, ainsi que le témoin de la défense Veronica Jones, qui connaissait White, ont tous affirmé lors du procès que White n’était pas à l’endroit d’où elle prétendait avoir vu la fusillade (Chobert : NT 19/6/82, p. 227-228 ; Scanlan : NT 25/6/82, p. 58 ; Magilton : NT 25/6/82, p. 86 ; Jones : NT 29/6/82, p. 129-130). William Singletary a témoigné que White était venue le voir après la fusillade pour lui demander ce qui s’était passé (31/8/90, déposition 25).

Veronica Jones a témoigné lors du procès de 1982 que White avait bénéficié de faveurs de la part de la police en échange de son faux témoignage (NT 29/6/82, p. 129, 134-136). Faulkner et Smerconish affirment de façon mensongère que Jones a déclaré cela pour la première fois lors des audiences post-condamnation de 1996 (page 183). La photographie de White avait été affichée dans le commissariat de police de Faulkner, avec instruction d’appeler la brigade criminelle quand elle serait arrêtée. Elle a été arrêtée deux fois dans les huit jours suivant la fusillade, et on l’a laissée repartir uniquement après qu’elle avait signé de nouvelles déclarations pour la brigade criminelle. A chaque fois, elle a changé sa version pour incriminer davantage Mumia (NT 21/6/82, p. 159-190 ; 22/6/82, p. 31, 33, 55-58). Au cours des audiences post-condamnation de 1997, la prostituée Pamela Jenkins a témoigné que White lui avait dit qu’elle avait été menacée par la police (NT 26/6/97, p. 48). Dans une déclaration sous serment de 2002, Yvette Williams, qui était dans la même cellule que Cynthia White, affirme elle aussi que White avait été menacée par la police (déclaration du 28/1/02).

Le mensonge : Faulkner et Smerconish écrivent que le chauffeur de taxi Robert Chobert, qui lors du procès de 1982 « a désigné Abu-Jamal » comme étant le tireur (page 37), « a vu Danny s’effondrer sur le sol, et le “tireur”, debout devant lui, tirer à nouveau à trois reprises » (page 14). Ils rapportent aussi que Chobert affirme qu’il était garé derrière la voiture de Daniel Faulkner au moment de la fusillade (page 308).

La vérité : En 1995, Chobert a reconnu qu’il n’avait pas vu la fusillade (déclaration sous serment de G.M. Newman, 25/9/01). Chobert n’était pas garé derrière la voiture de police de Faulkner, un fait confirmé par les clichés de la scène du crime pris par le photographe indépendant Pedro Polakoff et récemment retrouvés, après que l’accusation les avait dissimulés pendant près de 25 ans. Prises quelques minutes seulement après la fusillade, ces photos montrent qu’aucune voiture n’était garée derrière le véhicule de Faulkner.

Lors du procès de 1982, Chobert avait reconnu que Mumia ne correspondait pas à la description d’un homme noir corpulent qu’il avait faite à la police (NT 19/6/82, p. 234-235). Chobert avait dans un premier temps déclaré à la police, la nuit de la fusillade, que le tireur s’était « enfui », ce qui aurait été impossible pour Mumia étant donné ses blessures par balle presque fatales (NT 1/6/82, p. 70 ; 19/6/82, p. 234-235). C’est seulement après de nouveaux interrogatoires que Chobert a modifié sa version (NT 19/6/82, p. 236-237). Chobert conduisait alors qu’il s’était fait retirer son permis, et était en liberté conditionnelle pour avoir jeté un cocktail Molotov dans une école (NT 19/6/82, p. 220-222 ; 15/8/95, p. 5-6). Lors des audiences post-condamnation de 1995, Chobert a reconnu qu’il a secrètement bénéficié de faveurs de l’accusation en échange de son témoignage, et qu’il avait été gardé au chaud par la police pendant toute la durée du procès de 1982 (NT 15/8/95, p. 4-10).

Le mensonge : Faulkner et Smerconish écrivent que « seules deux personnes ont été vues par les cinq témoins oculaires s’approcher de Danny – William Cook et Mumia Abu-Jamal » (page 172). Outre White, Chobert, Scanlan et Magilton, le cinquième « témoin » dont il est fait mention ici est Robert Harkins. Faulkner et Smerconish présentent son témoignage aux audiences post-condamnation de 1995 comme « corroborant les récits de Chobert et White » (page 23).

La vérité : Cinq témoins ont dit qu’un ou deux hommes noirs s’étaient enfuis vers l’est après la fusillade. Lors du procès de 1982, le témoin de la défense Dessie Hightower avait insisté qu’il avait vu quelqu’un s’enfuir du lieu de la fusillade (NT 28/6/82, p. 125-137). Debbie Kordansky, Veronica Jones et Robert Chobert avaient dans un premier temps déclaré à la police qu’ils avaient vu quelqu’un s’enfuir du lieu de la fusillade (Kordansky : IIR 9/12/81 ; Jones : IIR 15/12/81 ; NT 1/6/82, p. 70), mais Jones et Chobert sont ensuite revenus sur ces déclarations lors du procès suite à des pressions de la police (NT 19/6/82, p. 236-237 ; 29/6/82, p. 99-102). Lors des audiences post-condamnation de 1996, Veronica Jones est revenue sur son témoignage du procès de 1982, en expliquant qu’elle avait été menacée par la police de plusieurs années de réclusion criminelle et de se voir retirer ses enfants si elle ne témoignait pas contre Mumia (NT 1/10/96, p. 20-24, 32-33). Lors des audiences post-condamnation de 1995, William Singletary a témoigné qu’il avait vu le passager sortir de la Volkswagen, tirer sur Faulkner et s’enfuir (NT 11/8/95, p. 235-236), et Hightower a réaffirmé qu’il avait vu un homme s’enfuir du lieu de la fusillade, et a déclaré qu’il avait subi le harcèlement de la police pour avoir dit la vérité (NT 3/8/95, p. 18-19, 23-24, 103).

Les déclarations de Harkins à la police étaient tellement contradictoires avec celles des témoins de l’accusation, et avec le scénario de l’accusation concernant la mort de Faulkner, que l’accusation ne l’a pas appelé à la barre lors du procès de 1982. Dans ses déclarations à la police (IIR 9/12/81, 17/12/81) et lors des audiences post-condamnation de 1995 (NT 2/8/95, p. 205-206), Harkins a affirmé qu’il avait vu seulement une personne à proximité de Faulkner, le tireur.

Le mensonge : Faulkner et Smerconish maintiennent la version de l’accusation selon laquelle William Cook aurait été seul dans sa Volkswagen quand il avait été arrêté par Faulkner, et ils prétendent que Cook « n’a jamais dit à la police qu’il y avait quelqu’un d’autre avec lui dans la Volkswagen » (page 141).

La vérité : Il y avait un passager, Kenneth Freeman, dans la voiture avec William Cook. Dans ses déclarations de mai 1999 et d’avril 2001, William Cook a confirmé que Freeman était dans la voiture avec lui. Lors des audiences post-condamnation de 1995, William Singletary a témoigné qu’il y avait un passager, qu’il portait une veste de treillis (ce qui confirme la déclaration de Cook), que cet homme était le tireur et qu’il s’était enfui (NT 11/8/95, p. 234-236).

Lors des audiences post-condamnation de 1995, il a aussi été révélé que la police avait retrouvé sur Faulkner une demande de permis de conduire au nom d’un certain Arnold Howard (NT 9/8/95, p. 6 ; 11/8/95, p. 131, 139-140, 167). Cette information avait été dissimulée à la défense lors du procès de 1982. Elle est d’une importance cruciale parce que Howard avait donné ce document à Kenneth Freeman. La présence de Freeman dans la voiture expliquerait comment le document s’est retrouvé entre les mains de Faulkner. En 1995, Howard a déclaré que Freeman lui avait dit qu’il était dans la Volkswagen au moment de la fusillade (NT 9/8/95, p. 9-10, 23 ; déclaration sous serment de Howard, 8/8/95).

Joseph McGill, le procureur qui a accusé Mumia en 1982, avait auparavant poursuivi William Cook pour agression. Lors du procès de Cook, Cynthia White – qui d’après d’autres témoins n’avait pas assisté à la fusillade, et avait demandé à Singletary ce qui s’était passé – avait témoigné qu’il y avait un passager dans la Volkswagen de Cook, et que ce passager était sorti de la voiture quand l’agent Faulkner s’était approché côté conducteur (NT 29/3/82, p. 33 ; déposition de Singletary, 31/8/90, p. 24-25). Lors du procès de Mumia, elle a modifié son témoignage pour affirmer qu’il n’y avait personne d’autre sur le trottoir (NT 22/6/82, p. 134).

Même dans son livre, Maureen Faulkner reconnaît qu’après avoir stoppé la voiture de William Cook, Daniel Faulkner avait passé « l’appel normal à des renforts avant de sortir de sa voiture, et a ensuite modifié sa demande, déclarant au central : “à la réflexion, envoyez-moi un fourgon” » (page 22), ce qui indique qu’il était probable qu’il y avait une deuxième personne dans la voiture.

Les aveux bidon

Le mensonge : Faulkner et Smerconish écrivent : « Aux urgences, Abu-Jamal a été entendu par deux témoins crier sur un ton de défi, “J’ai abattu ce fils de p--e, et j’espère que ce fils de p--e va mourir” » (page 24). Ces deux « témoins » étaient l’agent de sécurité de l’hôpital Priscilla Durham et l’agent de police Garry Bell.

La vérité : Il n’y a jamais eu d’aveux. Comme l’affirme Mumia dans sa déclaration sous serment de 2001 : « A cause du sang dans mes poumons, il était difficile de parler et impossible de hurler. Je n’ai jamais rien avoué, parce que je n’avais rien à avouer. » Ces « aveux » ont été fabriqués de toutes pièces par l’accusation, au cours d’une table ronde avec des flics, deux mois après la fusillade (NT 1/8/95, p. 78-79, 91), après qu’il était devenu évident que les précédents aveux bidon concoctés par l’inspecteur Alfonzo Giordano, qui faisait l’objet d’une enquête pour corruption, ne pourraient pas être utilisés (voir ci-dessous).

Gary Wakshul, l’agent de police affecté à la garde de Mumia pendant toute la nuit de la fusillade, écrivait dans son rapport le jour même : « l’homme noir n’a fait aucun commentaire » (IIR 9/12/81 et NT 1/8/95, p. 38). L’accusation et le juge Albert Sabo ont empêché Wakshul de témoigner lors du procès de 1982, mais lors des audiences post-condamnation de 1995 il a témoigné que ni Durham ni Bell n’étaient même présents au moment des prétendus aveux (NT 1/8/95, p. 23, 51). Dans plusieurs rapports, Stephen Trombetta, l’autre agent de police affecté à la garde de Mumia, a clairement indiqué que Mumia n’avait pas fait d’aveux, y compris à l’hôpital (IIR 9/12/81, 17/12/81, 12/2/82).

En fait, à l’hôpital, l’agent de police Garry Bell a menacé Mumia, en déclarant : « S’il [Faulkner] meurt, tu meurs » (LeGrand : IIR 2/2/82 ; Prayer : IIR 8/2/82 ; Durham : IIR 9/2/82). Aucun des flics et des agents de sécurité de l’hôpital n’a rapporté avoir entendu ce que Bell et Durham ont affirmé avoir entendu, alors même que d’après Durham 15 ou 20 flics étaient à proximité immédiate (NT 24/6/82, p. 57). Ni Bell ni Durham ne rapportent même que l’autre ait été présent. Bell n’a jamais mentionné les « aveux » ni dans son rapport de cette nuit-là, ni dans la déclaration qu’il a faite aux enquêteurs le 16 décembre 1981. Il a mentionné pour la première fois avoir entendu les aveux de Mumia le 25 février 1982.

Faulkner et Smerconish mentionnent un bout de papier non signé, tapé à la machine – soi-disant daté de décembre 1981 et écrit par le supérieur de Durham – qui serait la transcription des « aveux » (pages 309-310). Mais lors du procès, Durham a nié avoir jamais vu ce rapport (NT 24/6/82, p. 98-99). En 2003, le beau-frère de Durham, Kenneth Pate, a fait une déclaration où il affirmait que Durham lui avait dit qu’elle avait fait l’objet de pressions des flics pour qu’elle mente en disant que Mumia avait fait des aveux (déclaration du 18/4/03).

Tours de passe-passe balistiques

Le mensonge : Faulkner et Smerconish écrivent que les balles retrouvées dans le corps de Faulkner « correspondaient à l’arme achetée par Abu-Jamal » (page 24).

La vérité : Rien n’a jamais « correspondu », pas même la moindre preuve que l’arme de Mumia ait été utilisée cette nuit-là ! Le service balistique de la police a affirmé que le plus gros fragment de balle extrait de la tête de Faulkner était trop endommagé pour être expertisé, et un deuxième fragment de balle extrait de la blessure à la tête a simplement disparu sans laisser de trace (NT 23/6/82, p. 108 ; 2/8/95, p. 62-66, 75-77). On a peine à le croire, mais la police n’indique même pas avoir jamais recherché la présence de traces de poudre sur les mains de Mumia ou sur son arme, ni cherché à savoir si son arme avait été utilisée cette nuit-là (NT 2/8/95, p. 66-72). Comme le montrent les photos de Polakoff, le flic qui a ramassé les armes sur les lieux de la fusillade l’a fait, contre toutes les règles, à mains nues. Il a attendu deux heures avant de les remettre au service balistique, ce qui laissait tout le temps pour falsifier les preuves (NT 19/6/82, p. 169 ; 9/12/81 Prop. Rect.)

Faulkner et Smerconish déclarent qu’une balle retrouvée dans le corps de Faulkner était « compatible » avec le pistolet Charter Arms de Mumia (page 24), et ils citent des bribes du témoignage d’Anthony Paul, l’expert en balistique des flics lors du procès de 1982 (page 318). « Compatible » est un mot de code que les procureurs utilisent quand les preuves ne concordent pas. En fait, Smerconish et Faulkner omettent les deux pages suivantes du témoignage de Paul, où celui-ci reconnaît que la balle aurait aussi bien été compatible avec « des millions et des millions » d’autres armes (NT 23/6/82, p. 168-169).

Le mensonge : Murdered by Mumia affirme que la défense « n’a jamais présenté le moindre commencement de preuve » qu’un fragment de balle était manquant (page 117).

La vérité : Le fragment de plomb et ses dimensions (10x3x2mm) sont enregistrés dans le rapport d’autopsie du médecin légiste (rapport d’autopsie du 9/12/81). Comme cela a été noté plus haut, ce fragment a disparu, et il n’a pas été conservé comme preuve balistique – ces faits ont été établis par les experts cités par la défense de Mumia lors des audiences post-condamnation de 1995 (NT 2/8/95, p. 75-77 ; 4/8/95, p. 40-42 ; 9/8/95, p. 151).

Murdered by Mumia ne peut pas réfuter le fait que le rapport du médecin légiste, que le procureur avait qualifié d’« expert » en balistique lors du procès de 1982 (NT 25/6/82, p. 176), affirme que Faulkner a reçu une balle de calibre 44 ; l’arme de Mumia était un calibre 38 (rapport du 9/12/81 ; NT 2/8/95, p. 73-74 ; 9/8/95, p. 190). Le fragment manquant pourrait être ce qui reste de la balle de calibre 44 initialement mentionnée par le médecin légiste, ou d’une balle tirée par le revolver de calibre 22 que Beverly affirme avoir eu sur lui la nuit où Faulkner a été abattu.

Le mensonge : Faulkner et Smerconish prétendent que l’arme de Mumia « a été retrouvée sur les lieux ainsi que cinq cartouches, qui toutes avaient été tirées », que Mumia avait tiré sur Faulkner dans « le haut du dos », puis au « centre du visage », et que « ces deux balles ont été tirées à moins de cinquante centimètres de distance » (page 24). Dans tout le livre, Faulkner et Smerconish reprennent la version de l’accusation selon laquelle, après avoir abattu Faulkner dans le dos, Mumia se serait tenu au-dessus de lui, alors qu’il était allongé sur le trottoir, et lui aurait tiré en plein visage à au moins trois reprises.

La vérité : Rien n’établit l’existence de ces trois ou quatre balles qui toutes sauf une auraient raté leur cible, quasiment à bout portant. Comme le confirment les photos de Polakoff, il n’y a pas d’impact de balle sur le trottoir (ni de marque de balle), ce qui prouve que le scénario de l’accusation est une pure invention.

Le mensonge : Murdered by Mumia affirme que « les douilles retrouvées dans l’arme d’Abu-Jamal étaient toutes du Special +P (4 de marque Federal, 1 de marque Remington) », « une munition spéciale, avec une charge de poudre extra-lourde » qui « ravage sa cible » (page 115). Faulkner et Smerconish prétendent que ceci montre que Mumia était « pleinement déterminé à tirer sur quelqu’un et à le blesser gravement ou le tuer », qu’il voulait perpétrer « l’exécution de quiconque se mettrait en travers de son chemin » (page 87).

La vérité : L’arme de Mumia n’avait pas de munitions Plus P. Le rapport du service balistique de la police du 5 janvier 1982 ne désigne pas les cartouches dans l’arme de Mumia comme du Special Plus P, alors même que de telles cartouches auraient été clairement identifiables. Démontrant le tissu d’incohérences que constituent les mensonges de l’accusation, l’agent de police James Forbes, qui avait été en possession des armes après la fusillade, a témoigné lors du procès de 1982 que les douilles des cartouches dans l’arme de Mumia étaient de marque Winchester, et non Federal ou Remington (NT 19/6/82, p. 175-176).

Mumia avait un permis pour une arme qu’il portait sur lui pour se protéger, après avoir été victime d’un vol à main armée alors qu’il conduisait son taxi.

Le mensonge : Smerconish et Faulkner écrivent qu’ « il a été déterminé que la balle qui a frappé Abu-Jamal a été tirée par l’arme de service de Danny, un Smith & Wesson calibre 38 » (page 24). L’accusation a toujours affirmé que Faulkner avait fait usage de son arme en tombant après s’être fait tirer dessus (NT 19/6/82, p. 12).

La vérité : Le scénario de l’accusation est démenti par le fait que la blessure de Mumia correspond à une trajectoire de balle fortement descendante (NT 4/8/95, p. 16-19, 21-22). Le rapport de l’expert médical du 9 décembre 1981, à 9 heures du matin (environ cinq heures après que Faulkner avait été abattu) affirme que le sergent Westermann, de la brigade criminelle, a déclaré à un enquêteur médical que Mumia s’était fait tirer dessus par « les renforts de police qui arrivaient sur place ».

L’arme que Faulkner aurait prétendument utilisée pour tirer sur Mumia n’était pas dans l’état que l’on aurait pu attendre de la part d’un amateur de chasse et policier ambitieux qui s’apprêtait à passer l’examen pour devenir enquêteur, qui plus est en patrouille dans le Centre-Ville de Philadelphie à 4 heures du matin. D’après le rapport balistique de la police, cette arme avait le percuteur tordu, contenait des résidus de poudre, était encrassée, et ne pouvait pas être armée en une seule pression sur la détente, parce qu’elle avait une poignée en caoutchouc surdimensionnée. Cette arme était probablement un « rebut ». Finalement, aucun des témoins de l’accusation n’a affirmé avoir vu Daniel Faulkner tirer sur Mumia (Chobert : NT 19/6/82, p. 267 ; White : NT 21/6/82, p. 104 ; Scanlan : NT 25/6/82, p. 47 ; Magilton : NT 25/6/82, p. 88-89).

La machination lors du procès

Le mensonge : Faulkner et Smerconish décrivent le juge Albert Sabo, qui avait présidé le procès de 1982 et les audiences post-condamnation de 1995-1997, comme un juge « digne et réservé » qui « avait la réputation de voir ses jugements très rarement renversés en appel » (pages 31-32).

La vérité : Les jugements de Sabo ont été renversés en appel dans plus d’un tiers des cas (J. Henderson, « Le juge Sabo de Philadelphie : le juge qui est devenu le roi de la peine de mort » [1996]). Au moment du procès de 1982, la greffière Terri Maurer-Carter l’avait entendu déclarer : « Je vais les aider à faire griller le n---e », un fait totalement passé sous silence dans Murdered by Mumia. Sabo a exclu Mumia du tribunal pendant près de la moitié de son procès, le privant ainsi de la possibilité de participer à sa propre défense. Pendant les audiences post-condamnation de 1995, le Philadelphia Inquirer écrivait au sujet de Sabo : « Le comportement du juge dans cette affaire était déjà troublant la première fois – et pendant les audiences de la semaine dernière il n’a pas donné aux personnes présentes une impression d’impartialité. » Une étude de 1996 a montré que Sabo avait condamné à mort plus de deux fois plus d’hommes, en grande majorité des Noirs et des Hispaniques, que tout autre juge en activité dans le pays. Il était membre retraité du Fraternal Order of Police, et bien connu, y compris dans l’establishment judiciaire de Philadelphie, comme un « procureur en robe de juge ».

Le mensonge : Faulkner et Smerconish déclarent que Joseph McGill, le procureur du procès de 1982, était « déterminé à admettre autant de jurés noirs que possible » (page 156).

La vérité : Joseph McGill a fait usage 11 fois sur 15 de son droit de récusation pour exclure des Noirs du jury de Mumia. Une étude statistique a montré que les procureurs de Philadelphie, dans les années 1980, avaient 5,2 fois plus de chances d’exclure des jurés noirs que des jurés blancs. En 1987, le bureau du procureur de Philadelphie a réalisé une vidéo de formation, basée sur ses pratiques de longue date, montrant comment exclure des jurés noirs en toute impunité. Un extrait, long d’une minute, de cette vidéo a été placé par Journalists for Mumia sur le site internet YouTube (voir http://www.youtube.com/watch?v=rv9SJPa_dF8). On y voit le procureur adjoint Jack McMahon conseiller aux procureurs de choisir des jurés qui soient « partiaux et plus enclins à condamner » ! Il conseille aussi aux procureurs d’éviter « les Noirs des quartiers à bas revenus », en précisant « on ne veut pas de gens intelligents ».

Les faits concernant les aveux d’Arnold Beverly

La déclaration sous serment du 8 juin 1999 par Arnold Beverly, où il explique en détail comment il avait été engagé pour tuer Faulkner, qui était devenu un problème pour la pègre et les flics corrompus, est une preuve capitale qui démontre clairement l’ampleur de la machination contre Mumia Abu-Jamal. Faulkner et Smerconish, qui rejettent d’emblée ces aveux, mentionnent à peine les procédures judiciaires de 2001 devant les tribunaux fédéraux et les tribunaux d’Etat où la défense a cherché à présenter ces aveux et une masse considérable de preuves qui les corroborent. Outre les déclarations sous serment de Mumia et de William Cook, celles-ci incluent les déclarations sous serment de Donald Hersing, une source confidentielle du FBI pendant l’enquête de 1981-1982 sur la corruption dans la police du Centre-Ville, et du détective privé Michael Newman. Ces preuves incluent aussi la déclaration sous serment du 28 juillet 2001 de l’avocate du Partisan Defense Committee Rachel Wolkenstein qui a fait partie de l’équipe des avocats de Mumia de 1995 à 1999. La déclaration de Wolkenstein énumère la longue liste de preuves qui corroborent les aveux de Beverly, et explique pourquoi l’ex-avocat principal de Mumia, Leonard Weinglass, avait refusé de présenter ces preuves devant les tribunaux.

Murdered by Mumia évite avec tellement de soin les aveux de Beverly, et les preuves qui les corroborent, que les auteurs ne mentionnent même pas les avocats qui dirigeaient l’équipe des défenseurs de Mumia à cette époque – Marlene Kamish, Eliot Grossman et Nick Brown – , et affirment au contraire de façon mensongère que l’actuel avocat de Mumia, Robert Bryan, « a remplacé Leonard Weinglass » que Mumia avait limogé en 2001 (page 292).

Le fait est que Faulkner et Smerconish ne peuvent pas réfuter les aveux de Beverly et la montagne de preuves qui les corroborent.

Fait : A l’époque où Faulkner a été tué, la police de Philadelphie faisait l’objet d’au moins trois enquêtes fédérales pour corruption impliquant des liens avec la pègre (déclaration sous serment de D. Hersing, 10/5/99). Le Département de la justice avait aussi des flics qui servaient d’informateurs dans ces enquêtes, y compris un policier dont le frère était aussi un flic. Le frère de Faulkner était un flic. Faulkner possédait aussi un appareil photo « Topcon » extrêmement coûteux, souvent utilisé à cette époque par le FBI, et il l’avait utilisé la nuit de sa mort (IIR de Wakshul, 16/12/81). Cet appareil photo, qui était en possession des flics de Philadelphie, a depuis disparu. Dans Murdered by Mumia, Maureen Faulkner raconte de façon énigmatique que pendant le procès de 1982, l’avocat de la défense Anthony Jackson « m’a posé une question très étrange. Il m’a demandé si Danny possédait un appareil photo. J’ai dit que oui » (page 36).

Fait : Maureen Faulkner écrit qu’Ed Frederick, un membre de l’Unité de surveillance de la police de Philadelphie, l’avait informée qu’après avoir rencontré Daniel Faulkner à Broad Street et Race Street, celui-ci « avait dû partir vers 2 ou 3 heures du matin pour procéder à des “inspections de club” au moment de la fermeture des bars » (page 18). Dans sa déclaration sous serment du 10 mai 1999, l’informateur du FBI Donald Hersing expliquait : « Les policiers en tenue devaient effectuer des “inspections de club” au Morning Glory et dans d’autres night-clubs ouverts après l’heure légale de fermeture, pour compter le nombre de personnes présentes dans les clubs. L’objectif visé en collectant cette information était de les aider à déterminer la somme qu’ils devaient demander en pots-de-vin. »

Fait : Pratiquement toute la chaîne de commandement de « l’enquête » sur la mort de Faulkner était soupçonnée dans des enquêtes fédérales pour corruption, y compris le chef de la Division centrale, John DeBenedetto (condamné) et le chef de la brigade criminelle, James Carlini (complice non inculpé). L’inspecteur Alfonzo Giordano, qui a plaidé coupable lors de son procès pour corruption en 1986, était le policier le plus haut en grade sur les lieux après la mort de Faulkner, et il a joué un rôle clé pour lancer et orchestrer la machination. Donald Hersing a déclaré sous serment que Giordano faisait partie d’un groupe de policiers engagés dans des activités de corruption (déclaration sous serment de D. Hersing du 10/5/99). Hersing a également déclaré que la police était au courant des enquêtes du FBI. Murdered by Mumia ne mentionne pas même une seule fois le nom de Giordano.

Fait : Giordano était le bras droit de Frank Rizzo, le chef raciste de la police de Philadelphie et plus tard maire de la ville à la fin des années 1960 et dans les années 1970. De 1968 à 1970, Giordano était le chef de la brigade de surveillance qui avait contribué à diriger une descente de police au siège des Black Panthers en 1970. Il a aussi supervisé le siège pendant 15 mois de la maison de MOVE à Powelton Village pendant 15 mois en 1977-1978, siège à l’issue duquel neuf membres de MOVE ont été envoyés en prison, accusés faussement d’avoir tué un flic qui était mort d’une balle perdue de la police. Giordano savait exactement qui était Mumia. Etant le policier le plus haut en grade sur place, il avait à la fois le mobile et l’occasion de faire accuser faussement Mumia du meurtre de Faulkner.

Fait : Giordano est à l’origine de l’affirmation que l’arme de Mumia – la soi-disant arme du crime – aurait été retrouvée à côté de lui dans la rue, malgré le fait que d’après les rapports de police, les flics étaient toujours à la recherche de l’arme environ 14 minutes après que des hordes de policiers étaient arrivées sur place (rapport de police, 17/12/81). C’est Giordano qui a affirmé que Mumia, alors qu’il était à l’intérieur du fourgon de police sur les lieux, aurait avoué avoir abattu Faulkner (IIR 9/12/81). Cette affirmation a été réfutée par Stephen Trombetta, qui était dans le fourgon avec Mumia et qui affirme que Mumia n’a fait aucune déclaration de ce genre (IIR 9/12/81).

Giordano est aussi le flic qui a organisé la prétendue identification de Mumia par Chobert (NT 1/6/82, p. 70-71). Giordano était un témoin clé de l’accusation contre Mumia lors des audiences préliminaires de janvier 1982 (NT 8/1/82, p. 90-99 ; 11/1/82, p. 71-78). Il a témoigné à nouveau lors d’une audience du 1er juin 1982 concernant les aveux bidon (NT 1/6/82, p. 67-98). Toutefois, Giordano n’a pas été appelé à témoigner lors du procès de 1982. Il avait été réaffecté à des tâches administratives, et il a démissionné de la police de Philadelphie un jour ouvrable après la fin du procès. Comme le faisait remarquer Rachel Wolkenstein dans sa déclaration sous serment du 28 juillet 2001, le fait que Giordano n’ait pas été appelé à témoigner par l’accusation constitue une « forte indication que le procureur connaissait le rôle de Giordano dans la corruption et qu’il a pensé qu’il serait trop risqué de le présenter au procès de M. Jamal ». Il est à noter que non seulement Giordano a disparu du livre de Faulkner et Smerconish, mais que ces audiences préliminaires brillent par leur absence parmi les transcriptions reproduites sur le site internet de Faulkner.

Fait : Comme cela a déjà été mentionné, au moins six témoins, dont deux flics, ont affirmé avoir vu sur les lieux quelqu’un, qu’ils pensaient être le tireur, portant une veste de treillis verte. Beverly et Kenneth Freeman, le passager de William Cook, portaient tous les deux une veste de treillis. L’affirmation de Beverly selon laquelle il avait été engagé, avec un autre homme, pour tuer Faulkner, est corroborée par la déclaration du 15 mai 1999 de Cook, où il affirme que Freeman lui a dit qu’il faisait partie d’un plan pour tuer Faulkner, et qu’il avait « participé à la fusillade ». La déclaration de Beverly qui affirme qu’« un agent de police en uniforme a tiré sur Jamal en arrivant sur les lieux » est corroborée par le récit du sergent Westermann, un policier de la brigade criminelle, qui a déclaré que Mumia s’était fait tirer dessus par « les renforts de police qui arrivaient » (registre du médecin légiste, 9/12/81).

Fait : Beverly a déclaré qu’il avait vu deux flics en civil et un agent de police en uniforme dans une voiture à proximité. Fin 1996, un témoin du nom de Marcus Cannon s’est présenté et a affirmé qu’il avait vu deux hommes blancs, qui semblaient être des policiers en civil, sur les lieux pendant que Faulkner se faisait tirer dessus (NT 30/6/97, p. 123-125). William Singletary a témoigné qu’il avait vu deux « chemises blanches » [nom donné aux policiers gradés] sur les lieux immédiatement après la fusillade. Comme l’explique Beverly dans sa déclaration sous serment, « les agents de police ne pouvaient se trouver là que pour m’aider ».

Mobilisons-nous pour la libération immédiate de Mumia !

Parlant de ceux qui se battent pour prouver l’innocence de Mumia, Faulkner et Smerconish écrivent : « Comme disait ce vieux propagandiste nazi, si vous dites un mensonge, qu’il est suffisamment gros, que vous le répétez suffisamment souvent, ça devient la vérité » (page 30). Telle est en fait exactement la méthodologie de Murdered by Mumia.

Dans son obsession à tuer Mumia, Maureen Faulkner se vante qu’elle-même et le Fraternal Order of Police ont tout fait pour empêcher que la voix de Mumia se fasse entendre depuis sa prison, revendiquant ainsi le fait de fouler aux pieds les droits qui lui sont garantis par le Premier Amendement de la Constitution. Elle et Smerconish attaquent le droit démocratique le plus fondamental quand ils vilipendent Mumia parce qu’il exerce son droit à faire appel de sa condamnation fabriquée de toutes pièces. Murdered by Mumia dégouline de racisme – dans ses attaques contre Mumia et ses partisans comme dans sa description de l’organisation MOVE comme un ramassis de meurtriers « sans foi ni loi » et « dangereux », ou dans son utilisation de mots de code qui sont le fonds de commerce des démagogues racistes. Faulkner et Smerconish se félicitent du soutien qu’ils ont reçu de la part de racistes et de xénophobes comme Joey Vento, le propriétaire du restaurant Geno, qui arbore un panneau où l’on peut lire : « Ici c’est l’Amérique. Quand vous passez votre commande, parlez en anglais. »

Smerconish lui-même a été conseiller politique de Frank Rizzo. Partisan déclaré du « profiling » racial et ethnique [c’est-à-dire définir des suspects sur une telle base] par les flics et les agents du FBI, il s’est fait connaître en qualifiant la torture à Abu-Ghraïb de « photos de pyramides de nus », et en appelant à des arrestations en masse des immigrés sans papiers qui manifestent pour leurs droits.

Smerconish et Faulkner dépeignent les Black Panthers tels que Mumia comme des « tueurs de flics » déterminés, et les partisans de Mumia comme des amis de « tueurs de flics » qui, comme les « terroristes », devraient ne pas avoir de droits. C’est un appel sinistre à la terreur policière non seulement contre les défenseurs de Mumia, mais aussi contre tous ceux qui s’opposent à l’oppression raciste, à la guerre impérialiste et à l’exploitation capitaliste. Ils ont l’audace d’écrire que MOVE était responsable d’une « explosion de bunker » qui a provoqué la mort de onze personnes, dont cinq enfants, le 13 mai 1985. Ils escamotent le fait que c’étaient les flics, sous le maire Démocrate noir Wilson Goode, avec l’aide et l’assistance du FBI, qui ont lâché une bombe sur la maison de MOVE à Osage Avenue, tuant onze membres de MOVE et leurs enfants et détruisant un quartier noir.

Parmi ceux à qui Smerconish et Faulkner décernent une mention honorable figurent plusieurs élus du Parti démocrate, comme le procureur de Philadelphie Lynne Abraham et Ed Rendell, le procureur qui a mis en accusation Mumia. Rendell a été plus tard maire de Philadelphie, et il est actuellement gouverneur de Pennsylvanie. En même temps, Murdered by Mumia prend pour cible même des figures des grands médias qui disent que même si Mumia est peut-être coupable, il devrait avoir un nouveau procès étant donné les preuves de violation des procédures par les flics, les tribunaux et les procureurs. Ces personnalités cherchent avant tout à redorer l’image du système de la « justice » américaine. En les attaquant, Faulkner et Smerconish essaient de dégager la voie pour l’exécution de Mumia, en intimidant quiconque oserait ne serait-ce que poser une question.

Plus de 800 personnes et organisations, dont des syndicats représentant des centaines de milliers de travailleurs, ont signé une déclaration du PDC intitulée « Nous exigeons la libération immédiate de Mumia Abu-Jamal, qui est innocent », et qui réclame aussi l’abolition de la peine de mort raciste. Parmi les signataires figurent l’écrivaine et Prix Nobel Nadine Gordimer, les intellectuels noirs Manning Marable et Henry Louis Gates Jr., l’acteur Danny Glover et de nombreux syndicalistes du monde entier. Le message de la déclaration du PDC a été relayé par le numéro de mars 2007 de Shopsteward, publié par le Congress of South African Trade Unions qui représente des centaines de milliers de travailleurs. Les syndicats qui se sont engagés en soutien à Mumia doivent être mobilisés dans l’action pour combattre cette machination raciste.

Mumia est la victime non pas d’un flic isolé, d’un mauvais procureur ou d’un juge raciste, mais d’un système tout entier de « justice » déterminé à réduire au silence ce combattant courageux de la cause des opprimés. L’Etat capitaliste – avec en son cœur les flics, les tribunaux et les prisons – est un instrument de répression pour le maintien de la domination de classe de la bourgeoisie. Les mensonges colportés par Smerconish et Faulkner ont été réfutés à de multiples reprises. Le fait qu’on leur donne maintenant à nouveau une tribune sur les chaînes d’information nationales doit faire comprendre que ceux qui luttent pour la cause de Mumia doivent être mobilisés sur la base qu’il est innocent.

Toutes les voies légales doivent être utilisées pour lutter pour la libération de Mumia. Mais il ne faut avoir aucune illusion que les forces qui le maintiennent depuis 26 ans dans l’ombre de la mort lui rendront justice. La seule pression qui aura un impact sur la bourgeoisie et ses tribunaux, c’est la peur des conséquences si Mumia était exécuté ou enseveli à vie dans une prison. Ce qui est nécessaire, de façon cruciale, c’est la mobilisation de la puissance sociale du mouvement ouvrier international dans la lutte pour la libération de Mumia. Si elle est entreprise avec une mobilisation des syndicats, la lutte pour libérer Mumia et abolir la peine de mort raciste sera un premier pas en avant gigantesque pour faire prendre conscience aux travailleurs que ce système doit être renversé par une révolution socialiste prolétarienne. Libération immédiate de Mumia Abu-Jamal ! Abolition de la peine de mort raciste !